Avoir un bébé peut être l’un des plus beaux moments de la vie d’une femme. C’est cependant là une experience non dénuée de stress. La grossesse et les mois suivants la naissance d’un enfant consitutent une période où ont lieu d’importantes modifications hormonales et émotionnelles qui peuvent sous tendre l’apparition d’un episode dépressif.
La dépression étant une maladie qui influe sur la pensée, les comportements et les émotions, sa fréquence sur la vie est de 6% chez les femmes et ce chiffre grimpe jusqu’à 10 à 15% chez les femmes enceintes. Malheureusement, les manifestations dépressives lorsqu’elles émergent chez cette population sont souvent à tort attribuées à de la fatigue. Or, elles sont le plus souvent l’apanage d’une dépression, dite dans ce contexte dépression avec début dans le péri partum.
Qu’est ce qu’une dépression avec début dans le péripartum ?
· Jusqu’à il y a quelques années, la dépression liée a la grossesse portait le nom de dépression du post partum. Les épisodes dépressifs pouvant aussi survenir pendant la grossesse, un nouvel indicateur a vu le jour : “avec début dans le péri partum’. Il fait référence au moment où les symptômes débutent : au cours de la grossesse et jusqu’à 12 mois après l’accouchement.
· Pour ce qui est de la dépression, c’est une maladie associée à des difficultés dans la vie quotidienne et à une souffrance personnelle majeurs, qui peut avoir des conséquences parfois lourdes en termes de fonctionnement social et professionnel.
Il est donc indispensable de la diagnostiquer et de la prendre en charge efficacement et précocément.
Son tableau clinique est fait d’une variété de symptômes :
· Une tristesse pathologique quasi-permanente et intense.Cette tristesse est associée à une douleur morale profonde, une perte de l’estime de soi et un pessimisme majeur avec aussi parfois des idées de culpabilité inappropriées.
· Une perte d’intérêt et du plaisir à l’égard des activités quotidiennes, même celles qui étaient habituellement plaisantes.
· Un ralentissement psychomoteur, observable par une modification de la marche, de la voix et de la fluidité des idées.
· Une fatigue
· Une perte d’appétit, souvent associée à une perte de poids.
· Des troubles du sommeil, avec souvent une insomnie parfois une augmentation des heures de sommeil.
· Des troubles de la mémoire et de concentration.
· Un sentiment d’avenir bouché avec absence de perspectives d’avenir.
· Des crises de pleurs.
· Le sentiment que la vie ne vaut pas la peine d’être vécue, des idées et projets de mort récurrents.
D’autres symptômes peuvent être présents dans le cas de la dépression avec début dans le péripartum, ces manifestations sont :
· L’impression de ne pas être en mesure de s’occuper de son bébé,
· Une extrême anxiété ou des crises de panique,
· La difficulté à prendre des décisions,
· Le sentiment d’être indigne d’être mère
Facteurs de risque de la dépression avec début dans le péripartum.
Facteurs psychiatriques
• Antécédents personnels de dépression du péri-partum
• Antécédents psychiatriques personnels ou familiaux (dépression)
Facteurs socio-économiques
• Isolement social
• Conflits conjugaux
• Évènements négatifs pendant la grossesse
• Niveau socio-économique bas
• Âge maternel aux extrêmes des périodes de fertilité
Facteurs obstétricaux
• Grossesse non désirée
• Antécédents obstétricaux : mort in utero, malformation fœtale, accouchement prématuré, etc.
• Grossesse à risque
• Morbidités néonatales
Facteurs endocriniens
• Hypothyroïdie
Baby-blues : principal diagnostic différentiel
Il s’agit d’un épisode affectif sans gravité, dont la prévalence est estimée entre 50 et 80%. Il apparaît classiquement au 3ème jour après l’accouchement, souvent de façon concomitante à la montée de lait. Ses symptômes ressemblent à ceux d’un épisode dépressif peu intense. Les signes caractéristiques sont une humeur labile, une anxiété, une irritabilité, ainsi que des difficultés à trouver le sommeil et des plaintes physiques variables. L’évolution est spontanément favorable dans les 15 jours.
Quel retentissement cela peut il avoir sur mon bébé ?
La qualité des premiers échanges mère-bébé est primordiale pour le devenir psychique de l’enfant. Les interactions précoces entre une mère déprimée, souvent moins attentive, et son bébé peuvent être perturbées et favoriser un mode d’attachement insécure. L’enfant peut alors être sujet à des troubles du sommeil ou de l’alimentation, une nervosité, des difficultés de séparation et à un développement psychomoteur perturbé.
Guérit-on de la dépression ?
Si elles sont traitées, la plupart des patientes se remettent de leur dépression. Le traitement inclut habituellement au moins une des thérapeutiques suivantes :
· Des médicaments : Les médicaments les plus utilisés pour traiter la dépression sont les inhibiteurs spécifiques du recaptage de la sérotonine (ISRS)
· Une thérapie familiale : En faisant participer d’autres membres de la famille à la thérapie, nootamment le partenaire.
· Une thérapie individuelle : le plus souvent de type cognitive- comportementale
· Un soutien social
Est-ce que les antidépresseurs pris pendant la grossesse, nuisent au bébé ?
C’est là effectivement une angoisse qui empêche plusieurs patientes de consulter ou de prendre leur traitement. Il existe actuellemnt des choix médicamenteux qui réduisent colossalement les risques sur le foetus, que votre médecin pourra vous exposer. Par ailleurs, il faut toujours se rappeler que, non traitée, la dépression peut avoir de graves effets sur vous et sur votre bébé.
Quels sont les risques majeurs de l’absence de prise en charge ?
· L’absence de prise en charge expose à un risque d’agravation des symptômes avec altération manifeste de l’interaction mère-bébé.
· La sévérité du tableau s’accroît si des symptômes psychotiques de type hallucinations ou délires sont associés aux symptômes dépressifs.
Il est donc nécessaire de songer à consulter dès l’apparition des premiers symptômes.
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Dr. Chaimaa Aroui
Psychiatre
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